Alain Fraval / Peintures / Paysages ?


Récits-paysages
AFPD, 1997

Entre feux et banlieues

Depuis la terrasse panoramique du Peyrou, à l’ouest de la ville de Montpellier, le regard s’évade jusqu’aux Cévennes annoncées par la sentinelle vigilante du pic Saint-Loup. Il glisse d’abord sur les premières collines urbaines couronnées de vieux parcs masquant les riches demeures patriciennes du siècle dernier. Au-delà du Mosson et des tours inquiétantes du quartier « chaud » de la Paillade, il rejoint la campagne viticole lentement grignotée par la progression de la ville tentaculaire.

Vu de la colline, où est perché l’orgueilleux et délicieux petit village de Murviel-lès-Montpellier, le danger est double. Du nord et de l’ouest, vient la menace permanente des incendies de garrigues, de l’est celle d’une urbanisation rampante. La métropole languedocienne a besoin d’espace, que les communes situées hors du district montpelliérain ne sont pas prêtes aujourd’hui à céder facilement. Fort de la résistance de ses administrés et de son terroir viticole classé en Appellation d’Origine Contrôlée, fier de ses innovations - la fermeture d’une décharge, la construction d’une station de lagunage et la réalisation d’aménagements pour limiter les incendies - le maire, issu de l’intelligentsia agronomique montpelliéraine, mobilise ses électeurs contre la progression de la banlieue porteuse de « problèmes sociaux ». Le vieux village est en cours de restauration, une nouvelle place est construite et, dans le cadre d’accords intercommunaux, un parc à thème sera érigé à la gloire de la science, près de l’autoroute aujourd’hui en construction au milieu des garrigues désertes.

La campagne autour de Montpellier se construit aujourd’hui plus comme territoire d’habitat qu’en tant qu’espace agricole. Là où des préoccupations de bien vivre et d’identité locale se manifestent, comme à Murviel, la lutte contre les fléaux s’organise. Les garrigues pâturées et les vignobles garantissent les habitants contre les incendies et préservent l’intégrité des biens et des personnes. Restent alors la menace de l’hydre urbaine visible à l’horizon et la volonté collective de la tenir à distance, pour préserver la qualité de la vie rurale. Sans ostracisme : « on ne veut pas seulement des gens riches, comme à Saint Clément-la-Rivière ou Saint-Gely-du-Fesc ».


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